Marie au Concile Vatican II
(au sanctuaire de
Talence, le 20 Mai 2012)
Il y a quinze jours nous avons contemplé Marie recevant son
Fils crucifié
dans ses bras. Dans sa tendresse maternelle pointe l’espérance
car Marie unit son regard au regard re-suscitant du Père. Dans le visage du Crucifié, regardé avec tant d'amour,
visiblement par Marie et invisiblement par le Père,
se dessine donc déjà le visage du
Ressuscité.
Et c'est chacun de nous qui se sent appelé
à se laisser saisir,
dans sa fragilité
librement consentie, par le regard re-suscitant du Père, dont l'écho visible, dans ce temps prépascal où nous cheminons
encore, est le regard plein d'amour de Marie.
Il y a huit jours nous avons rappelé qu'en Christ, passant par la mort et
la Résurrection, c'est la
création toute entière qui "gémit dans les douleurs
de l'enfantement attendant la Révélation
des Fils de Dieu" (Rm 8). Nous unissant au regard de Marie, écho donc du regard du
Père, notre prière d'intersession
embrasse ce qu'embrasse la Pâque
du Seigneur..., le devenir social et cosmique de l’univers.
Aujourd'hui contemplons en Marie regardant le Crucifié le jaillissement de
l'Église en faisant écho à l'enseignement du
Concile Vatican II.
I Le Concile Vatican II, un Concile ecclésiologique
Vatican II est avant
tout un Concile ecclésiologique,
c’est-à-dire qui approfondit le mystère de l’Eglise.
On venait de vivre une époque de
vifs conflits entre l’Eglise
et le monde environnant à la
suite de la Révolution
Française. On
vivait dans une certaine arrogance du développement
technique, scientifique, social dont on voulait croire qu’il apporterait félicité et
bonheur. Mais apparaissaient les signes précurseurs
d’un désenchantement.
Et l’Eglise se sentait appelé à ne plus
se comprendre face au monde mais dans le monde dont elle sentait l’euphorie du progrès s’épuiser.
Elle sentait devoir se comprendre en fonction de la Mission que lui confiait le
Christ et non plus en réaction
par rapport à un
environnement hostile.
Et l’Eglise a relativisé sa dimension institutionnelle, c’est-à-dire l’a mise en relation avec son mystère plus profond. La Constitution Dogmatique
LUMEN GENTIUM aborde le mystère de l’Eglise d’abord
comme Peuple de Dieu, Corps du Christ, Temple de l’Esprit, avant de réfléchir à sa structuration institutionnelle hiérarchique.
C’est donc sans difficulté que l’appel
universel à la
sainteté est
compris comme la vocation de tous. Et Marie, la première dans la hiérarchie de sainteté, mais non dans la hiérarchie de service où c’est
Pierre qui est le premier, Marie, donc, est logiquement présentée comme
l’archétype de l’Eglise,
son modèle.
II Le Concile Vatican II, un Concile compatissant
Or c’est
en se faisant la voix des sans voix, en se proclamant solidaire d’abord des pauvres et
de ceux qui souffrent que l’Eglise
cesse de se comprendre d’abord
face à
un monde hostile pour se comprendre dans un monde, non point sympathique ou
antipathique, mais traversé
par le combat spirituel qui traverse chacun de nous, qui traverse l’Eglise, qui traverse
ce monde et qui a sa source dans le Cœur
de Jésus, Lui qui a été tenté et au Désert et à Gethsémani.
C’est
ainsi que les premiers mots de la Constitution Pastorale GAUDIUM ET SPES disent : « Les joies et les espoirs, les
tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de
tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et
les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui
ne trouve écho dans leur cœur. »
III Le Concile Vatican II, un Concile marial
J’ose
donc dire que les Pietas, dont l’essor,
nous l’avons
dit il y a quinze jours, date d’il
y a six à
sept siècles,
peuvent être
lues comme prémonitoires
de Vatican II.
Le Pape Paul VI, le 7 décembre
1965, jour de la clôture
du Concile Vatican II en a ressaisi le dynamisme profond en disant : « L'humanisme laïque et profane enfin est
apparu dans sa terrible stature et a, en un certain sens, défié le Concile. La
religion du Dieu qui s'est fait homme s'est rencontrée avec la religion (car
c'en est une) de l'homme qui se fait Dieu. Qu'est-il arrivé ? Un choc, une lutte,
un anathème ? Cela pouvait arriver ; mais cela n'a pas eu lieu. La vieille
histoire du bon Samaritain a été le modèle et la règle de la spiritualité du
Concile. Une sympathie sans bornes pour les hommes l'a envahi tout entier. La
découverte et l'étude des besoins humains (et ils sont d'autant plus grands que
le fils de la terre se fait plus grand), a absorbé l'attention de notre Synode.
Reconnaissez-lui au moins ce mérite, vous, humanistes modernes, qui renoncez à
la transcendance des choses suprêmes, et sachez reconnaître notre nouvel
humanisme : nous aussi, nous plus que quiconque, nous avons le culte de
l'homme. . » http://docs.leforumcatholique.org/src/DOCUFCNUM7.html
C’est
par la Parabole du Bon Samaritain que le Pape Paul VI caractérise l’attitude de fond du
Concile Vatican II. Il y a plusieurs lectures possibles de cette Parabole. On
peut faire de Jésus
(ou ici de l’Eglise)
le Bon Samaritain et de l’homme
pécheur (ici l’homme moderne) le
Blessé
sur le bord de la route.
Mais on peut aussi faire de Jésus
le Blessé
sur le bord du chemin et de chacun de nous, et de l’Eglise, et de Marie, le Bon Samaritain.
Cette seconde lecture coïncide
avec la figure des Pietas. Elle nous fait comprendre en quoi nous ne sommes pas
seulement bénéficiaires de la grâce salvatrice de Jésus mais associés au don de cette grâce.
N’est-ce
pas là
le mystère
le plus profond de Marie.
P. Arnaud de VAUJUAS, curé
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